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Lorsqu’elle est morte en mer avec son mari, le 7 octobre 1940, à la suite de l’explosion de leur bateau au large d’Ocean City, le journal local n’a parlé que de la disparition de son époux sénateur. Pas un mot, pas une ligne sur Célia Steele.

La plupart d’entrenous ne connaissent pas son nom.

Pourtant, à bien y regarder, il y a des chances que Celia Steele ait impacté votre vie quotidienne, celle de vos grands-parents, de vos arrières grands-parents, de toute l’histoire de l’alimentation des cent dernières années.

A l’origine, Celia Steeve n’a pourtant pas grand-chose à voir avec une entrepreneuse de l’agro-alimentaire.

On est en 1923, à Oceanview, sur la côte est, dans l’État du Delaware.

Dans l’Amérique prospère d’avant 1929, qui voit la réussite de General Motors, Ford et Chrysler, elle n’est « qu’une » ménagère à la flamboyante chevelure rousse qui cherche à joindre les deux bouts en tenant tient un petit élevage de poulets qui grandissent en liberté.

Comme la plupart des femmes du coin, son petit élevage permet à Celia de troquer ses œufs contre d’autres denrées au magasin général. Le poulet se consomme peu, on ne le mange que lorsque des volatiles « non productifs » sont abattus ou lorsque les mâles, les coqs, sont tués au printemps.

Le mari de Célia, David Wilmer Steele , le futur sénateur, est alors garde-côte.

Celia Steele a l’habitude de commander des poussins par la poste, ça se fait comme ça à l’époque.

Mais un jour, son fournisseur, l’écloserie Dagsboro de Vernon Steen, se trompe d’un zéro : alors qu’elle attend 50 poussins, elle en reçoit 500.

Comme Celia ne peut pas les renvoyer et qu’elle n’est pas du genre à ne pas se laisser décourager, elle tente une expérience.

Elle ne va pas chercher à refourguer ses poussins à droite et à gauche (à l’époque, le nombre moyen de poulets par basse-cour n’est que de 23) , elle va les garder.

Mais comme il faut les aider à passer l’hiver rigoureux de la côte est, elle décide de les enfermer. Son mari lui dégote une grande caisse à piano qui fera bien l’affaire. Célia gave ses poussins de compléments alimentaires à base de vitamines A et D qui commencent tout juste à arriver sur le marché.

L’ingénieuse ménagère garde une partie de ses volailles pour la ponte. Et décide d’élever l’autre partie spécifiquement pour leur viande. Elle est la première à faire cela.

Sur les 500 poussins, 387 passent l’hiver.

Lorsqu’ils atteignent 2 livres, elle les vend en faisant un bénéfice de 62 cents par livre.

En 1924, Celia Steele exploite 1000 poulets.

En 1926, elle en exploite 10 000.

Et en 1935…250 000.

Celia pose fièrement devant le photographe du coin.

S’achète une belle maison à Ocean View, maintenant le Cafe sur 26

Puis un yacht de 10 000 dollars.

Son mari se lance en politique

On peut dire que Célia a découvert l’élevage industriel.

Dix ans après sa découverte, le Delaware est d’ailleurs devenu la capitale mondiale de la volaille.

A la veille de la seconde guerre mondiale, des architectes imaginent des élevages industriels de poulets où sont expérimentées avec succès plusieurs innovations : mangeoires automatiques remplies de maïs hybride, de sulfamides et d’antibiotiques, automatisation de l’ablation du bec ( le bec est le principal outil d’exploration d’un poulet), ventilation automatique et contrôle de l’éclairage qui permettra des années plus tard de modifier les cycles de croissance des volailles dans tous les élevages industriels du monde.

Des années plus tard, en 1974,  le Delaware reconnaissant inscrit au registre des lieux historiques la réplique exacte du premier poulailler industriel » de Celia Steele, que lui avait fabriqué son mari.

Le 25 octobre 1983, Celia Steele a été intronisée au Delaware Hall of Fame for Women pour son rôle dans le lancement de l’une des activités économiques les plus importantes du Delaware.

On ne parle plus , mais alors plus du tout, de son mari.

Aujourd’hui, le comté de Sussex dans le Delaware produit plus de 250 millions de poulets de chair chaque année, soit deux fois plus que tout autre comté américain.

La production de volaille est la première activité économique de la région :  elle constitue également sa première source de pollution.

En 2014, les américains consommaient 8 billions de poulets par an, soit 22 millions par jour.

Et comme l’explique Jonathan Safran Foer (1), « Entre 1935 et 1995, le poids moyen des poulets de chair a augmenté de 65%, tandis que la durée de leur croissance maximale chutait de 60% et leurs besoins en nourriture de 57%. Pour se faire une idée du caractère radical de ce changement, il faut imaginer des enfants atteignant 150 kilos à l’âge de dix ans tout en ne mangeant que des barres de céréales et des gélules de compléments vitaminés ».

150 kilos…

Qu’en penserait aujourd’hui Celia Steele ? 

 (1) Jonathan Safran Foer, Faut-il manger les animaux, Points ed

Alternative Vegan Media

Laurence Pieau


A Propos

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